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Un malaise à apprivoiser

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C’est là.

Même si on fait le choix de ne pas y penser, pas trop, de ne pas lui accorder d’importance surtout. C’est tout de même là et quelque part ça creuse. Même si on ne veut pas. Même si on se protège. Même si on garde son calme.

C’est là quand même, comme une tache au plafond, qu’on ne regarde pas tous les jours mais qu’on aimerait bien voir disparaitre. C’est là 1h30 par mois, un moment si bref et si long à la fois. Un instant suivi des mêmes questions amicales qui laissent pourtant une saveur amère en bouche. Expliquer le malaise demeure un challenge impossible. On voudrait que quelqu’un comprenne entre les lignes, par delà les mots, ne plus entendre les mêmes phrase, qui lassent.

Une fois la porte passée, on se dit “à dans 1 mois”, ça semble facile, ça ne l’est pas. On a l’impression qu’on passe à autre chose, mais dès la porte de la maison ouverte, il faut à nouveau poser des “non” et tenter de ne pas s’irriter d’un ton, d’une révolte, d’un malentend, faire preuve de patience devant l’évidence que pour lui aussi, c’est une épreuve.

Finalement on est seul. Dans nos pensées. Dans ces matins qui nous enserrent le coeur, quand on croit tout faire bien et qu’on fait tout de travers, quand on laisse la colère prendre le dessus, quand sa colère à lui prend toute la place et menace notre équilibre.

Le malaise, désormais à distance, a laissé dans son sillage un souffle rance, qu’il faut évacuer. Alors les mots fusent comme des lames de rasoir, le combat est ouvert, personne ne veut perdre et personne ne se tait. Et quand on y arrive, c’est parfois pire, du haut de ses 8 ans, c’est comme si j’abandonnais la partie. Il faudrait savoir laisser passer la vague, se souvenir que ses mots ne sont que des mots, qu’ils ne sont pas dits pour faire mal, qu’ils sont l’expression de ce trop plein qu’il ne sait pas gérer, un flux d’émotions presque incontrôlable.

Mais bien souvent ils ont atteint la faille avant que je ne puisse faire marche arrière, celle que je tente de guérir, celle qui au moindre geste un peu brusque vient à nouveau s’ouvrir et me laisse terrifiée face aux souvenirs. Alors je perds ce qu’il me reste de confiance, de patience et je me retrouve à tenter de me justifier encore une fois.

C’est là, qu’on le veuille ou non. Ca vient encore tester nos limites, jouer avec nos certitudes, ça vient remuer, ça vient nous demander de redéfinir nos priorités, c’est un deuil qui semble ne pas avoir de fin. C’est frustrant, révoltant. On se sent impuissant.

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Si nous avions été plus intelligents, tu aurais été plus heureux…

Avant de faire moi-même mon entrée fracassante dans la cour des postulantes au divorce, j’avais des idées toutes faites sur les couples, avec enfants, qui se séparaient. Le divorce pour moi ne devait en aucun cas remettre en cause les liens qui unissaient l’enfant avec l’un ou l’autre de ses parents. C’était une évidence. Pour divorcer, il fallait être intelligent et faire des compromis pour que son enfant ne souffre pas inutilement.

Oui mais…

Mes grandes illusions, sur la façon dont moi, l’époustouflante Marie Kléber, j’allais gérer les choses, se sont cognées la tête contre le mur menaçant qui s’est dressé devant moi, quand j’ai osé demander le divorce.

La guerre était déclarée. Et mon enfant était désormais au centre d’un conflit qui n’était pas le sien. J’avais beau l’aimer de toutes mes forces, il se trouvait en terrain miné, et je ne pouvais rien faire pour lever la menace imminente qui pesait sur lui.

J’ai compris qu’être intelligent ne changeait rien à la donne. L’essentiel était au fond d’être humain. Mais pour que ça fonctionne vraiment, il fallait que les deux mettent de côté leurs différents d’ex-couple et se concentrent sur l’enfant, unique héritier de la force de leur amour passé.

Oui mais…

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En grande naïve devant l’éternel que je suis, j’avais pensé que mes efforts suffiraient à entraîner l’ex à mes côtés, à lui faire changer d’avis sur pas mal de choses, pour le bien-être de notre enfant. Une fois de plus mes certitudes se sont fracassées contre le mur de silence et de mépris qu’il avait commencé à construire du temps de notre mariage. Pierre après pierre, il se coupait de moi, de nous, me reprochant de ne faire aucun pas vers lui.

A chaque bataille de gagnée, j’en perdais une autre. J’avançais pour mieux reculer, jusqu’au jour où j’ai avancé plus vite que lui, mettant un terme à la longue série de compromis, qui n’avait fait qu’emprisonner mon enfant dans un sas de non-dits.

J’ai compris qu’être humain ne suffisait pas quand l’autre ne lâche rien, quand il persiste dans sa folie, dans son envie de détruire. On ne change pas quelqu’un contre son gré, j’y croyais un peu sans en être totalement certaine. Je l’ai désormais intégré, accepté.

Comme on est deux dans un mariage, il faut être deux dans un divorce, pour que celui-ci ne se transforme pas en véritable guerre froide.

Si nous avions été plus intelligents, non, si nous nous étions vraiment aimé, si nous t’avions vraiment aimé, plus que tout, plus que nous et nos ego surdimensionnés, alors peut-être que nous t’aurions au moins épargné le sort de ces milliers d’enfants, dernière monnaie d’échange entre deux vies contrariées, entre son honneur sali et mon idéalisme amputé.