Louis vient de se disputer avec Maxime et il attend, que la colère se calme, que son cœur cesse de battre comme un train lancé à toute vitesse. Maxime raconte vraiment n’importe quoi. Cette fille aux cheveux longs au bras de son père, que du pipeau. D’abord son père il n’aime pas les cheveux longs. Il trouve ça banal, il le répète à maman quand elle veut changer de coiffure, quand le carré l’ennuie. Il confie à Léa qu’elle est bien plus jolie avec ses cheveux courts qu’avec de longues mèches sans charme. Maxime dit tout ce qui lui passe par la tête de toute façon et maman dit qu’il ne faut pas trop lui en vouloir, que sa mère est fragile. Tu parles, c’est trop facile. Et puis c’est pas de sa faute à lui. Maxime est jaloux c’est tout. Alors il a imaginé cette histoire stupide, il lui a même dit qu’elle était jolie, la jeune fille, qu’elle souriait et qu’on aurait dit qu’elle avait des paillettes dans les yeux. Et que son papa il avait l’air heureux.
Louis se penche et regarde son reflet dans la flaque. Maxime a du confondre. Ca arrive à tout le monde. Il a peut-être voulu lui faire du mal, histoire de se dire qu’il n’était pas seul à souffrir. Pari raté. Louis se concentre sur le reflet net. Il veut oublier les mots de Maxime mais ce n’est pas si facile. Puis il se souvient que papa, maman, Léa et lui c’est pour la vie!
Retrouvez les participations ici: Chez Isabelle Marie, Chez Captaine Demoral, Chez Josée, Chez Sweet Things, Celui qui faisait des sauts chez Sandra et Le texte de Marie LC (ci-dessous envoyé par mail):
Pendant qu’il attendait patiemment le bus, le jeune Edouard contemplait ses chaussures aux lacets bien blancs, encore presque neuves.
Il les aimait bien ces chaussures quoique côté couleur il aurait préféré du bleu. Elles existaient en bleu et même en vert et en jaune mais en bleu il n’y avait plus sa pointure et il n’était pas emballé par le vert ou le jaune. Alors il avait choisi cette couleur Bordeau, dont les lacets clairs se voyaient comme le nez au milieu de la figure. Edouard aimait bien que les lacets soient de la même teinte que les chaussures en général mais il s’était dit qu’il pourrait toujours les changer une fois à la maison.
A son arrivée chez lui, son premier geste fut d’aller chercher la boîte aux réserves de semelles et lacets et malheureusement, il n’y vit aucun lacet de couleur Bordeau. Il y avait des noirs, des marrons et même des bleu marine mais c’est tout et il se voyait mal arborer des lacets de couleur noire, marron ou marine sur ses chaussures Bordeau. Alors il se dit qu’il allait s’habituer.
Mais ça faisait à présent plusieurs semaines qu’il mettait ces chaussures et il ne se faisait pas à ces lacets blancs. Aussi se mit-il à tanner sa mère pour qu’elle l’emmène dans les magasins de chaussures voir s’il était possible de trouver des lacets Bordeau. Mais ils firent chou blanc, aucun lacet de cette couleur nulle part.
Alors, un soir que tout le monde dans la maison était occupé soit devant la télé, soit avec un bouquin, il décida de teindre lui-même ces fichus lacets. Il s’introduit discrètement dans la cuisine, y prit un bol et y versa un verre de vin rouge dont son père disait qu’il était fabuleux. Et emporta le tout dans sa chambre et y laissa tremper les lacets toute la nuit. Hélas, au matin, les lacets étaient vaguement rosés mais pas du tout Bordeau aussi, ce jour-là, il mit d’autres chaussures pour aller à l’école et laissa encore tremper les lacets dans le vin. Quand il rentra de l’école, aucun changement alors il prit son courage à deux mains et appela sa mère pour lui montrer le résultat de son travail.
Personne ne le gronda et durant quelques jours il mit d’autres chaussures pour laisser aux lacets le temps de sécher et à lui le temps de réfléchir au moyen de les teinter à son goût. Jamais il ne trouva de solution aussi opta t’il au final pour une paire de lacets noirs, plus discrets selon lui que ces blancs immaculés avant teinture improvisée.
« On n’obtient pas toujours ce qu’on veut lui dit sa mère et parfois il faut se contenter. ». Ce qui ne consola pas Edouard.
Marie LC, 24 février 2022
Et celui de MIJO ici:
Dès la sortie de l’école, le jeudi il ne traînait pas pour ranger ses affaires dans Son cartable. Une vieille sacoche de postier comme celle de « facteur cheval » – disait sa grand-mère. Dès le « au revoir » de la maîtresse nous nous faufilions rapidement entre les petits groupes de parents qui bavardaient, se racontant les progrès de leur enfant. Déjà grand pour ses huit ans, il détestait ces moments, surtout quand les mamili et les papili déposaient plus de bave sur vos joues qu’un bisou. Nous avions mieux à faire.
Nous arpentions vite sur le trottoir, sans nous laisser distraire par les odeurs de la boulangerie. Et pourtant les gourmandises ne manquaient pas dans la vitrine.
── Dis-donc Gaston où cours -tu ainsi ? Ce n’est pas le moment de flâner, la Berthe t’attend pour rentrer les vaches et couper l’herbe des lapins.
« Oh mince, je l’avais oublié ce filou d’Albert. Toujours là où il ne faut pas ! Ferait mieux d’s’occuper de distribuer le courrier. »
── Juste un petit détour, je n’en ai pas pour longtemps, m’ssieur Albert.
Nous ne stoppions pas notre déambulation entre les étals du fromager, du maraîcher et de la fleuriste. L’objectif était la boutique du coiffeur, juste après celle où nous aurions aimé faire une halte, le cordonnier.
─ Dis -donc parle pour toi Godillot gauche ! Moi je suis très bien comme je suis. Je ne cherche pas à tout pris à rajeunir. J’ai quelques éraflures, et alors, ce sont mes cicatrices de crapahutage ?
─ Moi je suis d’une lignée de noble cuir. Chez nous on aime le cirage à reluire. Notre fierté est d’avoir les coutures impeccables et les ferrets des lacets irréprochables. Talon et bout se doivent d’être ôtés de toute traces de boue ou de poussière.
─ Mais quelle vie aseptisée tu veux. Laisse donc place à l’aventure, aux incursions hors des sentiers battus. Chez nous les Godillots de droite, nous vivons notre vie pleinement hors d’une boite à chaussures.
A cet instant, une impulsion de Gaston, nous ramena à ce qui nous préoccupait tous les jeudis. Encore une fois, il la mangeait du regard. Camouflé par le tronc d’un platane, il l’observait à la dérobée. C’est vrai qu’elle était belle. De longs cheveux auburn, des yeux azur, rehaussés de longs cils, et un maquillage toujours discret. Aujourd’hui il était heureux, le coiffeur lui remonta les cheveux en chignon, ce qui dégagea sa nuque, révélant son port de tête princier. C’est vrai qu’elle avait l’allure d’une reine, dans son tailleur en pied de poule de couleur rose pâle. Ses gants assortis, comme ses escarpins complétés sa tenue. Elle avait un mini sac noir. Si petit qu’on se demandât bien ce qu’elle pouvait avoir dedans de plus que son porte-monnaie. Nous attendions sans broncher, nous préparant à la salve de coups de pieds qui allait suivre. Chaque fois que cette reine sortait du salon, un monsieur élégant venait la chercher dans une automobile rutilante. Sur le siège arrière, un autre enfant, attendait en mangeant un cornet de pop-corn.
« Je le déteste. Pourquoi l’a -t-elle gardé lui et pas moi ? »
Dès que la voiture s’en allait, nous étions soumises à une course effrénée sur un chemin rocailleux, un raccourci, pour rattraper le retard et rentrer les vaches avant la nuit pour la traite du matin. Nous subissions les assauts non seulement des cailloux, mais également des souches de bois sur lesquelles il passait son chagrin à grands coups de pieds. Nous redoutions, le sentier derrière l’étable, car il traversait la voie de chemin de fer. Les rails nous sciaient la cuirasse, lorsqu’il s’acharnait à nous frapper contre cette ferraille. Impuissantes, nous assumions notre rôle de chaussures protectrice de pieds toute en faisant preuve d’une parfaite abnégation. Cet enfant avait tant besoin d’amour!
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Pour la semaine prochaine, si ça vous dit, on repart sur une liste de mots – ils devront être utilisés dans votre texte dans l’ordre suivant: euphorie, menthe, cassette, plan, hydratation, secours, reprographie, filtration, fontaine, nuage. Au plaisir!!