C’était écrit noir sur blanc. Nélia sur la première page et puis. Et puis…
J’écris en pensant qu’il est temps peut-être que tu saches, d’où tu viens, qui tu es, pourquoi tu trembles le soir quand les lumières s’éteignent, pourquoi la lune est rouge, pourquoi les étoiles palissent au contact de tes larmes.
C’était un soir, un soir de printemps, avec une douce brise comme une invitation à se laisser porter par la vie. Nous regardions par la fenêtre les lumières de la ville. Nous étions bien. J’avais cette impression là. Puis j’ai senti sa bouche dans le creux de mon cou, j’ai frissonné. Juste un baiser. Puis j’ai senti ses mains autour de ma taille. Juste une accolade rapprochée. Puis ses mains se sont faites plus pressantes, elles se sont glissées sous mon pull et j’ai murmuré un “non”. Je me suis arrachée à son étreinte et je suis allée m’asseoir sur le fauteuil. Je lui ai dis que je ne voulais pas, pas maintenant, pas comme ça. Il m’a regardée, s’est approché et ses mains ont recommencé leur ballet intrusif. J’ai remué, j’ai dit “non” encore. Une fois, deux fois. Peut-être plus. Ses mains sont descendues, plus bas, encore et encore. Sa bouche aussi. Je ne voulais pas. Il disait “ne t’inquiète pas, je n’irai pas plus loin”. Pourtant il était déjà allé beaucoup trop loin à mon goût. Je me suis débattue, j’ai cogné avec mes jambes contre son torse. J’ai crié, je me suis levée et j’ai pris mes affaires. Les murs étaient aussi épais que du papier à cigarette, tout le monde pouvait tout entendre. Ce fut sûrement ma chance. Devant la porte, je me suis demandée si il allait ouvrir ou si il allait, contre elle, continuer ce qu’il avait commencé à faire. Je suis sortie dans la rue, mon coeur battait fort dans ma poitrine. Je courrais presque, comme pour lui échapper. Je courrais dans la nuit. Je courrais après mon ombre, loin de la sienne, loin de ce fauteuil, loin du contact de sa peau, loin de cette impression d’être passée à deux doigts du pire. Ce n’était pourtant que le début…
Je n’ai jamais vraiment su te parler de lui. Je n’ai jamais vraiment su te parler d’amour. Pourtant il y en a eu un peu, entre nous, assez au moins pour t’avoir, toi. Je n’ai jamais su te parler des hommes, je t’ai mise en garde souvent sans pouvoir te dire pourquoi. J’ai vécu ce que tant de femmes ont connu et connaîtront peut-être un jour, un “non” non entendu, un consentement ignoré, comme si nos voix ne portaient pas. Je t’écris pour que ma voix résonne, pour que tu ne portes plus le poids d’un passé qui ne t’appartient pas. Peut-être aussi pour que tu ne vives jamais cette humiliation-là.
Découvrez les autres participations ici: Le plan chez Mébul – My minds Visit – Cher P chez Manon
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Pour mardi prochain (28 avril), j’ai pensé à un exercice un peu différent: décrire votre “journée rêvée” sous forme de recette de cuisine! A vos plumes et encore merci, je suis toujours heureuse de découvrir vos textes et idées.
Eh oui, la peur, la honte, l’intrusion… si populaire malheureusement… dit en douceur, presque furtivement, ce qui donne plus de force et de poigne… tel est mon ressenti.
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Merci à toi.
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Si fort ce texte.
Le non résonne d’être répété, mais il n’est toujours pas entendu…
“pourquoi les étoiles palissent au contact de tes larmes” ❤
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Merci Cléa.
Combien de fois faut-il le dire??
Belle journée à toi.
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Wouah, un thème pénible mais si bien écrit. Merci pour ces mots qui touchent et disent ce qui ne devrait pas exister 🙏
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Merci pour ta lecture Nicole.
Ca ne devrait pas exister et malheureusement c’est encore très courant.
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Et oui… comment expliquer ces choses! A travers tes mots, tu as su… bravo!
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Tout n’est pas simple à dire en effet. Merci Josée
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Tu as raison les enfants sentent cela même si ils ne sont pas issus de ce non répété … la mère transmet sans le vouloir sa honte et son humiliation, le fait que certains hommes peuvent se transformer en prédateurs. C’est fort bien écrit ma chère Marie. Bises.
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Oui. Ce n’est pas toujours facile de dire ces choses-là. Peut-être que nous les cachons aussi parfois, quand elles ne sont pas digérées, intégrées.
Merci beaucoup Catherine. Grosses bises et douce soirée
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